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Par Pierre Ahnne le 8 Décembre 2020 à 16:58
« C’est la nuit qui est continue. C’est la nuit qui est le tissu
Du temps, la réserve d’être
Et le jour n’ouvre là-dessus que par de méchantes fenêtres et des poternes.
C’est le jour qui rompt et le jour n’ouvre là-dessus
Que par de pauvres jours
De souffrance. C’est le jour qui crève et les jours sont comme des îles dans la mer.
Comme des îles interrompues qui interrompent la mer.
Mais la mer est continue et ce sont les îles qui ont tort. »
Charles Péguy, Le Porche du mystère de la deuxième vertu
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Par Pierre Ahnne le 30 Juin 2020 à 16:50
« Car j’aime comparer à de très jeunes filles
mes pensées qui ont la courbe de leurs jambes craintives
et l’effarouchement moqueur d’éclats de rire.
Seules les jeunes filles ne m’ennuyèrent jamais :
Vous savez qu’elles vont, dont ne sait quoi, causer
le long des tremblements de pluie des églantiers.
Et moi, je ne sais pas ce que mes pensées pensent.
J’aurais dû naître un jour calme des grandes vacances,
lorsque les framboisiers ont des cousines blanches. »
Francis Jammes, Le Deuil des primevères
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Par Pierre Ahnne le 9 Juin 2020 à 17:41
« "Daigne protéger notre chasse,
Châsse
De monseigneur saint Godefroi,
Roi !
Si tu fais ce que je désire,
Sire,
Nous t’édifierons un tombeau,
Beau ;
Puis je te donne un cor d’ivoire,
Voire
Un dais neuf à pans de velours,
Lourds,
Avec dix chandelles de cire,
Sire !
Donc te prions à deux genoux,
Nous,
Nous qui, nés de bons gentilshommes,
Sommes
Le seigneur burgrave Alexis
Six !"
Voilà ce que dit le burgrave
Grave,
Au tombeau de saint Godefroi
Froid. »
Hugo, Odes et ballades
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Par Pierre Ahnne le 26 Mai 2020 à 18:25
« Ses yeux ont délaissé la page, elle les lève,
Et, sous l’impression du chapitre, elle rêve
Aux existences des personnages fictifs
Passionnés, vivants, ambitieux, actifs,
Dont les conflits ou les baisers forment l’intrigue ;
Elle s’arrête pour suspendre sa fatigue
Et se demande avec doute si, quelque jour,
Elle aussi connaîtra le dévorant amour
Qui trouble le sommeil et fait qu’on se décide,
En cas de trahison, au meurtre, au suicide ;
Belle, avide d’ivresse, elle cherche à savoir
Si cet amour peut en réalité se voir
Tel que la plume des romanciers nous le montre,
Ou s’il est chimérique et s’il ne se rencontre
Qu’en dépoétisé, qu’en faible, qu’en petit. »
Raymond Roussel, Le Concert
Illustration : Georges Croegaert, The Reader (1890)
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Par Pierre Ahnne le 12 Mai 2020 à 19:11
« Ah, je suis las de ce personnage que je fais entre les hommes ! Voici la nuit ! Encore la fenêtre qui s’ouvre !
Et je suis comme la jeune fille à la fenêtre du beau château blanc, dans le clair de lune,
Qui entend, le cœur bondissant, ce bienheureux sifflement sous les arbres et le bruit de deux chevaux qui s’agitent,
Et elle ne regrette point la maison, mais elle est comme un petit tigre qui se ramasse, et tout son cœur est soulevé par l’amour de la vie et par la grande force cosmique ! »
Paul Claudel, Cinq grandes odes
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